Création à quatre mains, l’ouvrage propose au lecteur de porter son attention sur un quartier en pleine mutation, en laissant son regard être transformé au contact de trois points de vue d’artistes : les poèmes de Sonia Brault, les photographies de Gilles Juhel et les dessins de Sarah Lévèque (voir l’article précédent pour des précisions sur la nature de l’ouvrage).
Concept
Le concept de mise en page que j’ai proposé vise à donner une homogénéité aux différentes contributions (poèmes, photographies et dessins), tout en laissant à chacun d’eux son univers propre. Ainsi, les œuvres de chaque artiste apparaissent chacune sur sa page dédiée. Le sentiment d’homogénéité de l’ouvrage vient de la sélection soigneuse des œuvres et du choix de leur ordonnancement, ainsi que de l’ajout d’aplats de couleur sur les dessins (initialement en noir et blanc) et de lettrines colorées, qui m’ont permis de créer un sentiment d’harmonie, malgré les disparités formelles de départ des trois ensembles.
Couleur
Les aplats colorisant tel dessin de Sarah ont été choisis dans les dominantes de la photo de Gilles que j’ai retenue pour être en regard, créant non seulement un sentiment d’homogénéité, mais aussi, pour le lecteur curieux et joueur, des suggestions d’associations signifiantes, que j’ai voulues inattendues à l’image de la « mécanique » poétique et des imprévisibilités des associations d’idées humaines, d’autant plus marquées dans un quartier où les référents culturels proviennent de pays et de continents divers.
Dans certaines double-pages, photo et dessin se côtoient. Dans d’autres cas, des textes séparent les deux illustrations associées par la couleur. C’est dans ce cas la couleur de la lettrine qui « fait le pont » entre la photo et le dessin (voir pour exemple les planches 2 et 3 ci-dessous).
Rythme
Non visible dans la sélection de planches ci-dessus, la succession des photos, dessins et textes a été étudiée pour créer un rythme riche et cyclique sur 8 pages, où toutes les combinaisons se retrouvent (double-pages avec seulement des images, avec seulement des textes, ou avec images et textes) – chaque medium pouvant requérir un temps de découverte propre.
Couverture
Le choix d’une composition en trois parties permet de rendre compte de la triple nature du contenu de l’ouvrage : photos, textes et images se trouvent ainsi présents d’une façon qui évoque déjà le type d’association qui les caractérisera à l’intérieur du livre : juxtaposition d’éléments qui a priori n’ont rien à voir, et qui pourtant se font écho, se répondent, se nourrissent de significations nouvelles au contact les uns des autres.
On pourra, si l’on veut, y voir un message : les humains, eux aussi, trouvent à s’enrichir et à se « mettre en harmonie » s’ils se côtoient suffisamment, dissolvant les représentations toutes faites dans la vraie rencontre d’histoires individuelles uniques. Cela demande d’être disposé à en prendre le temps. Riche idée je crois, car ce temps de la rencontre tient lieu, plus que tout autre peut-être, de véritable place de la paix.